#13 Marion, sorcière soignante (témoignage libre)

Je suis une sorcière.

Cette affirmation a mis un certain temps à s'imposer comme une évidence dans mon esprit. Comme un savoir, tapi depuis des décennies en mon sein, attendant de se révéler au moment opportun. Il y a tellement de puissance et de symbolique dans cette simple et courte expression, qu'il ne pouvait en être autrement pour moi.
Petite, comme beaucoup à cet âge, j'avais développé une passion pour l'ésotérisme, la magie, la divination, mue, je pense en partie, par la littérature jeunesse (et oui, j'ai moi aussi voulu intégrer Poudlard) les films et les jeux vidéos. Ce monde-là avait l'air d'être tellement plus beau que mon quotidien. Enfance se transformant en adolescence, j'ai affiné ma sensibilité en y additionnant une dose d'Histoire et, peut être, de chauvinisme. Je me suis penchée sur les Celtes, leur divination et leur approche du monde, là encore par le biais de la littérature. Et puis la vie a fait que cet intérêt a été relégué au rang des "passions enfantines" puisqu'il fallait grandir, et ne s'exprimait finalement qu'au travers de mes lectures.
Il y a quelques années, aux alentours de mes 26 ans, j'ai eu le sentiment d'apporter un peu de spiritualité à ma vie, une autre approche du monde, notamment via les arts martiaux : j'ai eu la chance d'approcher la pensée japonaise puis chinoise au point d'en avoir radicalement changé ma vision du monde. Et un homme aussi, qui a compris et partagé ma démarche. Chacun de notre côté, nous avons décidé de développer cette partie de nous-même en dormance pour la laisser s'exprimer. Concrètement, mon travail de païenne à réellement commencé à partir de Mabon 2017. J'avais fait énormément de recherches, commençant avec les livres sur la Wicca, dont je me suis très rapidement éloignée, et puis en creusant d'avantage sur ce qui m'avait parlé petite : l'univers celte. Très tâtonnante au début, j'ai décidé de célébrer chacun des sabbats, adaptant mon autel à cet effet, consacrant une journée complète à la réflexion du sabbat, de la cuisine, et un rituel le soir. Au fil du temps, j'ai fini par aiguiser mon approche.

Et finalement, quelle est cette approche ? Il s'agit, chez moi, d'une approche spirituelle, symbolique et esthétique du monde. Une façon de sortir de ma temporalité pour me plonger dans une dimension immuable, hors de toute conception d'espace temps. Je ne crois pas, à proprement parler, en l'existence du petit peuple. Je ne crois pas que lancer des sortilèges fonctionne parce que j'invoque telle ou telle divinité. En revanche, je suis convaincue de la puissance et de la portée du symbole, et de ce que nous sommes en mesure d'accomplir quand on se sent en sécurité et mu par quelque chose de plus grand. Le merveilleux a longtemps été l'explication que nous offrions au monde, faute de pouvoir le comprendre. Aujourd'hui, il me permet d'avoir l'esprit ouvert et une conception plus légère et bien plus philosophique du monde. Je fais des charmes, je fais mes rituels, parce que je sais que c'est le rituel qui m'importe, le temps consacré à cette dimension, que ça soit dans la création purement matérielle (cuisine, confection d'objets), ou spirituelle de ce rituel ; une part esthétique sinon artistique est aussi présente dans l'écriture de ce dernier. J'offre régulièrement des créations magiques à mon entourage, sachant que parce que cela vient de moi, qu'ils savent le soin que j'ai mis à les préparer, ils vont y accorder une attention toute particulière... Et c'est cette attention qui va, à mon sens, rendre efficace mon charme. Et parce que je crois que tout esprit intelligent et cultivé, au bout d'un moment, a besoin de cette dose de créativité merveilleuse, je me laisse porter par cet univers de magie. J'aime voir des signes, non pas parce que je pense qu'ils vont m'apporter quelque chose, mais parce que ma connaissance m'a permis d'être plus attentive à ce qui m'entoure.

Étudiante en médecine chinoise, le soin à toujours été quelque chose d'important pour moi. Les plantes, les cataplasmes, les potions, etc, tout ça a toujours fait partie et fait partie de mon quotidien. Je complète mon savoir par d'autres approches, constatant souvent que des caractéristiques magiques d'une plante sont liées à ses vertus médicinales. Et elle se trouve là, la sorcière en moi. Dans cette connaissance que j'espère être subtile du monde, nuancée et poétique. Rabelais l'avait dit : "Science sans conscience, n'est que ruine de l'âme", mais apporter un peu de magie à ce monde ne peut décemment pas faire de mal . C'est arriver à faire d'un ensemble de connaissances, un tout avec des liens et des passerelles. Un endroit dans mon esprit, où science, connaissance, art et spiritualité s'interconnectent les uns aux autres et vivent en harmonie. Et parce que c'est l'ignorance qui a toujours fait le plus de mal, le rôle de la sorcière ne se cantonne pas à sa magie. Il est d'instruire et d'aider autrui. Il est dans sa générosité et sa vision complexe du monde. Même si très souvent, pour mieux comprendre le monde et les gens, il faut en être à l'écart. Cette pratique est intégrée à mon quotidien, me permettant de souffler en cas de coup dur, de retrouver un peu d'inspiration et de créer une osmose.

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